mardi 28 avril 2020

Décès d'Henri WEBER


L’ancien sénateur et député européen Henri WEBER, une des figures de mai 68 devenu cadre du parti socialiste, est décédé ce dimanche 26 avril du coronavirus à l’âge de 75 an.

J’ai connu personnellement Henri WEBER dans les années 1964-1966 à Paris dans les Assemblées et les Congrès de l’UNEF, c’était un personnage attachant, brillant et très ouvert aux débats contradictoires. 

Je l’ai revu la dernière fois à la Sorbonne en 2012 lors d’une réunion. Son intervention portait sur les dangers d’une économie assise sur les seules ressources pétrolifères.

Fils de juifs polonais Henri WEBER est né le 24 juin 1944 à Leninabad, en URSS (aujourd’hui Khodjent, au Tadjikistan), dans un camp de travail soviétique, sur un navire-hôpital amarré sur les rives du fleuve Syr-Daria. 

Sa famille, juive polonaise, avait fui sa ville de Chrzanów, en Galicie, à quelques kilomètres d’Auschwitz, au moment de l’invasion nazie de la Pologne, en 1939, choisissant l’URSS.

Refusant de devenirs citoyens soviétiques, les époux Weber furent envoyés d’abord dans un camp de travail en Sibérie avant d’être transférés, à leur demande, à Leninabad. Là-bas, le père est employé comme bûcheron et la mère comme couturière. 

« Ce n’était pas un centre de détention à régime sévère, encore moins un camp d’extermination mais un vrai camp de travail : une fois leur journée accomplie, les détenus vaquent librement à leurs occupations », explique Henri Weber, dans son autobiographie Rebelle jeunesse (éd. Robert Laffont, 2018).

Une fois la guerre terminée, la famille Weber retourna un temps en Pologne, mais l’antisémitisme encore très présent les convainquit de partir. 

En 1948, les Weber s’installent à Paris, où le père reprend son activité d’horloger.

 

Henri Weber, à Paris, le 24 avril 2014. ERIC FEFERBERG / AFP

Henri et son frère sont inscrits à l’Hachomer Hatzaïr, un mouvement scout laïc, sioniste et socialiste. 
Ce sera sa véritable matrice politique, qui guidera ses futurs choix militants. A commencer par son opposition à la guerre d’Algérie (1954-1962) quand il était au lycée. 

A 16 ans, il adhère aux Jeunesses communistes au grand dam de ses parents, antistaliniens.
Jeunesse communiste révolutionnaire

Il est toujours adhérent au parti communiste de Maurice Thorez quand il entre, en 1962, à la Sorbonne. En bon militant discipliné, il s’inscrit à l’UNEF et à l’Union des étudiants communistes (UEC). 
A l’époque, l’UEC est un chaudron où se côtoie tout ce que la gauche radicale comprend de chapelles. Les sensibilités trotskistes y sont nombreuses et actives.



Les trotskistes sont finalement exclus du PCF et de l’UEC en 1965. La Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR) est alors créée.

Avec Alain KRIVINE il participe à la création du mouvement des Jeunesses communistes révolutionnaires en 1965, puis co-fondateur de la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) en 1969. 

Peu à peu, les premières fissures apparaissent dans les convictions trotskistes de Weber. Il s’éloigne de son organisation, de ses camarades, et se concentre sur ses travaux de recherche, observe ce qu’il se passe à l’étranger. Il s’intéresse notamment à l’eurocommunisme. 

Il lit, creuse, écrit plusieurs ouvrages (comme Marxisme et conscience de classe, Bourgois, 1974 ; Parti communiste italien : aux sources de l’Eurocommunisme, 1977, chez le même éditeur), travaille sa matière…

« A la fin des années 1970, j’étais mûr pour me rallier à l’expérience du nouveau PS, confesse Weber dans son autobiographie. (…) Il me fallait du temps pour opérer mon travail de deuil (…) Je suis donc parti sans bruit. »

Les hommages

“Henri Weber était une de ces mémoires fertiles de la gauche, il en connaissait l’histoire, jusque dans ses moindres détails”, a salué Olivier FAURE, Premier secrétaire du PS, auprès de l’AFP. “Mais il ne rêvait pas d’un âge d’or à retrouver, il était dans la recherche permanente de nouvelles solutions”.

“Ces derniers mois, il s’était engagé dans le chantier de la rénovation des formes partisanes. Il était inlassable. Passionné. Passionnant. Le Parti socialiste perd ce soir un esprit incisif qui a bien souvent éclairé notre route. Notre tristesse est immense”, a-t-il poursuivi.

“Henri Weber Ã©tait une grande et belle figure de la gauche. Il ajoutait à son érudition une clarté d’analyse, un goût de l’action et une fraîcheur militante avec un humour joyeux qui enchantait jusqu’à ses contradicteurs”, a écrit François HOLLANDE dans un communiqué publié lundi. “C’est un homme généreux et un intellectuel lumineux qui disparaît aujourd’hui. Et aussi un ami cher”, ajoute l’ancien président de la République.



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