jeudi 29 septembre 2022

Lettre ouverte à Bernard KOUCHNER

 

Cher Bernard,

Ton interview sur LCI d’hier soir m’a laissé un goût amer. J’ai donc décidé de t’adresser cette lettre ouverte. 

Je prends la liberté de te tutoyer comme nous l’avons toujours fait lorsque tu étais en position de responsabilité à Médecins Sans Frontières (MSF) ou à Médecins du Monde (MdM).

Bien sûr je n’étais qu’une petite main au sein des associations, il est probable que tu aies oublié mon nom. Cependant nous nous sommes bien connus dans le passé. J’étais présent à tes côtés quand il y a eu cette réunion qui a vu éclater MSF en 2 ou 3 associations différentes. Ta colère était juste et je la partageais totalement, mais depuis les choses ont bien changé.

Lors des élections législatives de 1993 tu es venu soutenir la candidature d’Eric Ghebali dont j’étais le suppléant.Tu étais alors encore fréquentable.

Tu as, comme beaucoup, lentement mais sûrement évolué vers des positions politiques que je ne partage plus avec toi.

Depuis – oui les temps ont changés – je devrais dire « t’ont changé ». Tu as rallié Sarkozy, les média qualifiant cela d’une prise de guerre importante. En vérité ce n’était là qu’un ralliement de circonstance dans le cadre de ton profil de carrière.

Ton anticommunisme primaire doublé d’une russophobie maladive est devenu insupportable.

A tel point que répondant au journaliste te demandant : « Quid de Kouchner l’américain ? Puisqu’il semble que ce soit ainsi que l’on vous dépeint outre atlantique ? ». Dans un demi sourire ta réponse est stupéfiante : « Je ne sais pas si l’on me dépeint ainsi mais ce que je sais : ce sont les Américains qui nous ont délivrés du nazisme. Ce n’est pas de Gaulle – il a fait ce qu’il pouvait – mais sans les Américains que serions-nous aujourd’hui ? ». Tu as, à l’évidence, escamoté l’importance de l’URSS dans la défaite des nazis. En quelque sorte tu refais l’Histoire en la falsifiant. Cela s’appelle du révisionnisme.

Tout au long de cette interview tu as montré cette russophobie qui à l’évidence t’aveugle. Certes Poutine est l’agresseur mais tu oublies un peu rapidement les fautes de Zelenski qui n’a pas respecté les accords de Minsk, qui a depuis 2014 bombardé les territoires pro-russes de l’Est de l’Ukraine. Pour autant cela ne justifie ni la violence, ni les exactions commises par les troupes russes. Ces exactions ne sont certainement pas unilatérales. « Toutes troupes d’occupation vit sur le pays occupé » disait Jean-Paul SARTRE, ajoutant à juste titre « même l’Armée Rouge » ce qui lui avait valu les foudres du Parti Communiste.

Le Parti Communiste, oui, parlons-en. Il est vrai que – tout comme moi – tu n’en as jamais été membre. Tous les 2 nous avons été membres de l’Union des Étudiants Communistes (UEC) dans laquelle ensemble nous luttions contre le stalinisme. Il y avait là du beau monde. Certains se sont fourvoyés vers la droite (Claude MALHURET, Xavier EMMANUELLI entre autres), d’autres sont restés fidèles à un idéal de solidarité (je pense à Alain KRIVINE). A l’époque tu as combattu cette dérive droitière avant de la rejoindre.

Souviens-toi aussi d’EMMANUELLI qui en 1979 ironisait (dans le journal médical « Tonus ») sur le fait tu voulais affréter un bateau pour le Viet-Nam « L’Ile de Lumière » pour venir au secours des boat-peoples vietnamiens, fustigeant ton action en lançant cette phrase assassine « Pourquoi pas un bateau pour St Germain des Près ». Malgré ces critiques « L’Ile de Lumière » a pu appareiller et dans la foulée début 1980 MdM a été fondé.

D’aucuns t’ont reproché la fameuse photo te montrant portant un sac de riz. Dérisoires ces reproches. Cette photo a fait le tour du monde, elle était le meilleur ambassadeur montrant l’action humanitaire qu’avec d’autres tu pilotais. Cela a cru pouvoir t’autoriser à donner des leçons. A l’époque oui il fallait donner des leçons à tous ceux qui restaient passifs et ne s’engageaient pas dans des actions humanitaires. 

Hier soir à LCI tu as montré, comme souvent, une certaine condescendance et une tendance à donner des leçons.

Mais tu n’as plus de leçons à donner depuis que tu as accepté de te mettre au service d’une idéologie partisane que je réprouve. Je n’oublie pas que lors de la visite en France du Colonel Kadhafi tu as désapprouvé Rama Yade (ta secrétaire d’État attachée au Ministère des Affaires Étrangères) qui protestait estimant que la France n'était pas « un paillasson ».

Il fut un temps où nous estimions que « la fin ne justifie pas les moyens », mais ce temps semble pour toi être révolu. C’est regrettable. Personnellement je reste sur cette ligne même si cela est difficile par les temps qui courent.

Alors, oui, ta prestation sur LCI n’est pas seulement la démonstration d’un renoncement, elle est plus que lamentable, elle est tout simplement pitoyable.

 

jeudi 1 septembre 2022

Répression des Ouïgours :

 

l’ONU dresse un réquisitoire accablant contre la politique de la Chine au Xinjiang

Selon le rapport du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme publié le 31 août 2022. « L’ampleur de la détention arbitraire et discriminatoire » de membres de la minorité musulmane dans la région peut constituer « des crimes contre l’humanité ».

Détentions arbitraires, tortures, stérilisations forcées… C’est un véritable réquisitoire contre la politique menée par Pékin que présente ce rapport du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme.

Le verdict est sans appel : « L’ampleur de la détention arbitraire et discriminatoire d’Ouïgours et de membres d’autres groupes essentiellement musulmans (…) dans un contexte de restrictions et de privation des droits fondamentaux tant individuels que collectifs peut constituer des crimes internationaux, en particulier des crimes contre l’humanité. »

Pour arriver à cette conclusion accablante, l’ONU dit avoir été informée « fin 2017 » de « disparitions » au Xinjiang, et s’être mise au travail dès 2018. Le rapport est fondé sur les écrits, et les déclarations des autorités chinoises elles-mêmes, mais aussi sur le travail de chercheurs, sur des images satellites, ainsi que sur les témoignages livrés suite à 40 entretiens, dont 26 personnes ayant été internées ou ayant travaillé dans des camps du Xinjiang depuis 2016.