mardi 8 juin 2021

Alors qu’il saluait la foule le chef de l’État a été giflé


De Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon, les condamnations sont unanimes.

Suite à la visite du président au lycée hôtelier de Tain-l’Hermitage, où il s’est rendu cet après-midi pour rencontrer des acteurs de la restauration, le Président Emmanuel MACRON a été giflé par un individu qui après avoir saisi le bras du président lui a asséné une gifle en prononçant un cri de guerre royaliste « Montjoie Saint-Denis ! » ainsi que « A bas la macronie ».

Aujourd’hui, cette expression est utilisée par certains militants de l’extrême droite française et en particulier des partisans royalistes selon un membre de la majorité, Roland LESCURE.

Le député LFI de Seine-Saint-Denis Éric COQUEREL rappelle : « C’est exactement sous ce slogan de “Montjoie Saint-Denis”, que j’ai été également agressé par des militants de l’Action française il y a quelques années, un groupuscule royaliste également. ».

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier FAURE a immédiatement réagit : « La République doit être unie pour combattre toutes les violences. Solidarité sans nuance avec le Président »,

Dans son intervention devant l’Assemblée Nationale le Premier ministre Jean CASTEX a déclaré que « la politique ça ne peut en aucun cas être la violence, l’agression verbale, et encore moins l’agression physique ». « J’en appelle à un sursaut républicain, nous sommes tous concernés, il en va des fondements de notre démocratie », a-t-il ajouté.

Jean-Luc MELENCHON s’est également exprimé sur Twitter : « Cette fois-ci, vous commencez à comprendre que les violents passent à l’acte ? »,

Le chef des députés Les Républicains Damien ABAD a également apporté son soutien au chef de l’État : « Gifler le président, c’est gifler la République. Intolérable, inacceptable. »

Dans un message sur Twitter l’ancien président de la République François HOLLANDE a réagi :

« Agresser le Président de la République c’est porter un coup insupportable et intolérable à nos institutions. Face à ce geste inqualifiable, toute la nation doit être solidaire du chef de l’État. J’adresse dans ces circonstances tout mon soutien à Emmanuel Macron. »

Il va sans dire que je condamne cet acte d’agression à l’égard du Président de la République.

Dans le débat public la violence n’a pas sa place.

 

mercredi 2 juin 2021

Tulsa : théâtre d’un massacre raciste longtemps oublié par les USA


Un beau geste de la part du Président des USA Joe BIDEN

Le président s’est rendu mardi 1er juin 2021 dans cette ville de l’Oklahoma en souvenir du drame qui s’y est déroulé en 1921, réaffirmant son engagement « à extirper le racisme systémique » des lois américaines.

« Nous n’oublierons pas. » Joe BIDEN a fait du lundi 31 mai le jour du souvenir du massacre raciste de Tulsa survenu un siècle plus tôt.

Longtemps ignoré par l’histoire des Etats-Unis, ce bain de sang s’était déroulé pendant deux jours, le 31 mai et le 1er juin 1921, dans cette ville alors très prospère de l’Oklahoma, un jeune Etat créé en 1907, déjà connu pour ses ressources en pétrole et où une importante communauté afro-américaine s’était installée dans l’espoir de fuir le racisme des Etats sudistes.

 

Après le massacre du 31 mai, 6000 habitants noirs de Tulsa seront parqués dans des camps.

Un incident mineur opposant Dick ROWLAND, un jeune Noir cireur de chaussures, à l’opératrice d’un ascenseur, une Blanche, avait entraîné un appel au lynchage relayé par un journal local.

Des anciens combattants afro-américains de la première guerre mondiale avaient voulu empêcher l’exécution par une foule de Blancs du jeune homme, alors aux mains de la police municipale. Un coup de feu, dont l’origine n’a jamais été identifiée, avait alors déclenché un déchaînement de violence inouï dans le quartier de Greenwood habité exclusivement par des Noirs, surnommé « Black Wall Street » pour son dynamisme économique.

Dans sa déclaration de lundi, Joe BIDEN a retenu le bilan le plus souvent avancé, celui de 300 morts pour la communauté afro-américaine.

Livré aux flammes, bombardé même par les premiers aéroplanes utilisés dans l’agriculture pour les épandages d’engrais et de pesticides, Greenwood avait été réduit en cendres. Plus de 8 000 des 11 000 Noirs qui y résidaient en avaient été chassés.

Il y a tout juste 20 ans, Arnaud SAGNARD enquêtait sur la plus effroyable émeute raciale de l’histoire américaine. En replongeant dans ce drame, le journaliste découvre des parallèles avec la façon dont la France reçoit le mouvement #BlackLivesMatter

Voici quelques extraits de son reportage :

« Volontairement, j’ai gardé pour la fin ce qui faisait le cœur de mon reportage d’alors : la reconstitution de ce qui s’est réellement passé le 31 mai 1921 et les jours suivants. Grâce au travail de fourmi de Scott Ellsworth, j’ai pu raconter heure par heure l’enchaînement d’actions qui a abouti à la pire émeute raciale de l’histoire du pays. En quelques lignes, les voici. Ce jour-là, Dick Rowland, cireur de chaussures de 19 ans, prend l’ascenseur du Drexel Building, seul bâtiment de la ville blanche qui accepte les Noirs, pour se rendre aux toilettes. C’est Sarah Page, une jeune fille blanche de 17 ans, qui manœuvre l’appareil. À la redescente, elle hurle, Rowland s’enfuit en courant. Les employés de l’immeuble accourent. Sarah Page dit avoir été agressée, Rowland est arrêté. Le soir même, dans son éditorial, le Tulsa Tribune recommande de le lyncher. Dans la foulée, des Blancs tentent de forcer la porte du palais de justice où il est détenu. Des Noirs armés dont des vétérans de 1914-1918 s’y rendent à leur tour. Une bagarre éclate, des coups de feu sont tirés, une dizaine de Noirs est blessée par balle. Ils fuient, la police confie alors à certains Blancs présents la mission de faire régner l’ordre. Ceux-ci se réunissent et décident d’envahir Greenwood. L’armurerie de la ville est pillée, des voitures pénètrent dans le quartier et tirent sur les passants, les incendies commencent. Au petit matin le lendemain, la police est toujours débordée par les milliers d’émeutiers. Une mitrailleuse est installée sur une colline pour abattre les derniers défenseurs. A.C. Jackson, le chirurgien noir le plus éminent du pays se rend à la foule, un adolescent l’abat. Les habitants noirs finissent par se rendre, d’autres ont fui par les champs. La police les parque pendant que la zone résidentielle de Greenwood est mise à sac. Arrivée par train à midi, la Garde nationale désarme les Blancs qui sont renvoyés chez eux. « Black Wall Street » est rasé, il y a six mille prisonniers noirs dans des camps improvisés, seuls les domestiques sont libérés. Les jours suivants, les obsèques sont interdites, aucun décès n’est enregistré. Par peur des représailles, une milice blanche est créée. Un décret municipal empêche la reconstruction, les propriétaires ruinés doivent vendre les terrains qui serviront à une extension de la ville blanche. Deux mois plus tard, un groupe d’avocats noirs parviendra à faire annuler le décret municipal.

Et Dick Rowland dans tout ça ? Libre. Sarah Page a raconté à la police l’avoir giflé quand il lui avait pris le bras parce qu’il avait trébuché en entrant dans la cage d’ascenseur. Elle a paniqué, il n’y a jamais eu d’agression sexuelle. Pour l’historien Scott Ellsworth, ce massacre n’est pas une tentative de lynchage qui a mal tourné mais l’aboutissement d’une tension extrême dans une ville qui avait perdu tout contrôle sur elle-même. En vingt ans grâce au boom pétrolier, la population de Tulsa a été multipliée par 100, la police était inefficace et criminelle, la justice débordée avec 6000 procédures en attente. Enfin, la réussite économique de la population noire incarnée dans un quartier florissant a nourri la haine et la paranoïa sur un éventuel soulèvement. En un mot, il ne manquait qu’une étincelle pour que tout implose »

« La dernière leçon que j’ai apprise lors de mon séjour, il faut se méfier de ses propres certitudes car l’Histoire finit souvent par rattraper ceux qui l’ignorent »

Arnaud SAGNARD