Les
scientifiques américains affirment qu’un vaccin répandu contre la tuberculose
affecte la morbidité et la mortalité du Covid-19. De quel traitement s’agit-il
exactement et quelle est son efficacité réelle?
Ces
derniers jours, les médias étrangers ont débattu de la question de savoir si un
vaccin classique contre la tuberculose pouvait protéger contre le nouveau
coronavirus. Il s'agit notamment de Bloomberg, Reuters, Daily Mail et The New
York Times. D’innombrables publications sont en effet apparues à propos du
vaccin bilié de Calmette et Guérin, plus connu comme BCG, répandu dans le monde
entier depuis près d'un siècle, ainsi que de soudains rapports avançant que ce
préparatif pourrait être une arme contre le Covid-19, à l'origine de la
pandémie.
En
Russie, ce vaccin est omniprésent et obligatoire pour tous les enfants du 3 au
5e jour de vie (sauf contre-indications). Cela peut-il expliquer pourquoi il y
a encore si peu de cas de contamination dans le pays – seulement 3 548 au
2 avril sur 144,5 millions de personnes ?
D'où proviennent les données sur le
lien entre le BCG et le coronavirus ?
Hôpital
clinique Filatov à Moscou, reconverti dans l'accueil des patients atteints du
Covid-19 Agence Moskva
Il s'agit d'une étude réalisée par le personnel du
Collège américain de médecine ostéopathique. Le 28 mars, le site web MedRxiv a
publié une pré impression de leur document de recherche montrant la différence
de mortalité due au coronavirus entre les pays où la vaccination par BCG est
obligatoire et ceux où elle est facultative ou inexistante.
« Nous avons constaté que les pays sans politique universelle de vaccination par BCG (Italie, Pays-Bas, États-Unis) ont été plus sévèrement touchés que les pays ayant une politique universelle et de longue date en matière de BCG », y est-il assuré.
La mortalité dans les pays où la vaccination est obligatoire est, il est vrai, 30 fois plus faible que dans les pays où la vaccination par BCG n’est plus pratiquée depuis longtemps. « Nous avons aussi constaté que la vaccination par BCG a également réduit le nombre de cas de Covid-19 signalés dans un pays », notent les chercheurs.
« Nous avons constaté que les pays sans politique universelle de vaccination par BCG (Italie, Pays-Bas, États-Unis) ont été plus sévèrement touchés que les pays ayant une politique universelle et de longue date en matière de BCG », y est-il assuré.
La mortalité dans les pays où la vaccination est obligatoire est, il est vrai, 30 fois plus faible que dans les pays où la vaccination par BCG n’est plus pratiquée depuis longtemps. « Nous avons aussi constaté que la vaccination par BCG a également réduit le nombre de cas de Covid-19 signalés dans un pays », notent les chercheurs.
Selon leur version, cela
explique pourquoi il existe une si grande différence d'indicateurs entre
l'Espagne et le Portugal voisins. L'Espagne a un taux de mortalité beaucoup
plus élevé et a cessé son programme de vaccination obligatoire au BCG en 1981.
Au Portugal, cela ne s'est produit qu'en 2017.
Il en va de même en Allemagne de l'Est (ex-RDA avec vaccination obligatoire), où le taux de mortalité est désormais inférieur à celui de l'Allemagne de l'Ouest.
Au Portugal, cela ne s'est produit qu'en 2017.
Il en va de même en Allemagne de l'Est (ex-RDA avec vaccination obligatoire), où le taux de mortalité est désormais inférieur à celui de l'Allemagne de l'Ouest.
Qu’est-ce que ce vaccin ?
Il est ici question du seul vaccin certifié contre la
tuberculose. Chaque année, il est administré à 130 millions de personnes dans
le monde.
En 2018, 153 pays l’ont fait. Les nations développées l’administrent partiellement (uniquement pour les enfants à risque) ou pas du tout, en raison du pourcentage radicalement faible de patients atteints de tuberculose. Les États-Unis et les Pays-Bas, par exemple, n'ont jamais utilisé le vaccin à grande échelle.
En 2018, 153 pays l’ont fait. Les nations développées l’administrent partiellement (uniquement pour les enfants à risque) ou pas du tout, en raison du pourcentage radicalement faible de patients atteints de tuberculose. Les États-Unis et les Pays-Bas, par exemple, n'ont jamais utilisé le vaccin à grande échelle.
Toutefois, environ 10 millions de personnes dans le
monde contractent la tuberculose chaque année.
C'est pourquoi ce vaccin s’avère toujours obligatoire dans les pays à haut risque d'infection, notamment au Brésil, en Russie, en Inde, en Chine, en Afrique du Sud.
Ce vaccin ne garantit pas une immunité absolue, mais il protège à 60-80%.
C'est pourquoi ce vaccin s’avère toujours obligatoire dans les pays à haut risque d'infection, notamment au Brésil, en Russie, en Inde, en Chine, en Afrique du Sud.
Ce vaccin ne garantit pas une immunité absolue, mais il protège à 60-80%.
Département
de l'Institut Sklifosovski à Moscou Alexander Avilov/Agence Moskva
Qui l'a inventé ? Est-il vrai que
cela a été fait en URSS ?
L'Union soviétique a été le premier pays où le vaccin
est devenu obligatoire pour tous, mais il
a été inventé non pas ici, mais en
France, en 1919.
Il a été fabriqué à partir d'une souche de bacille de
la tuberculose bovine vivante affaiblie par les scientifiques Albert CALMETTE et
Camille GUERIN.
Cependant, leur vaccin était liquide, ne se conservait
pas longtemps et n'a guère été reconnu par le public (en 1930, à cause d'une
erreur, le vaccin a tué 72 des 240 nouveau-nés de la ville de Lübeck).
En 1925, CALMETTE a donc transféré le vaccin aux scientifiques
soviétiques pour qu'ils le révisent, et ceux-ci ont à leur tour prouvé son
efficacité.
En 3 ans, il a été accepté par la Société des Nations.
En 3 ans, il a été accepté par la Société des Nations.
Le vaccin n'aide pas seulement
contre la tuberculose ?
De telles études ont été menées depuis longtemps.
Actuellement, on estime que le BCG a un effet protecteur dans 20% des cas de
lèpre.
Il est également utilisé en immunothérapie pour le cancer de la vessie, et jusqu'en 2015, on pensait que le vaccin était efficace contre l'ulcère de BURULI.
Il est également utilisé en immunothérapie pour le cancer de la vessie, et jusqu'en 2015, on pensait que le vaccin était efficace contre l'ulcère de BURULI.
Peut-il aussi aider à lutter contre
le Covid-19 ?
Pour le déterminer, nous avons besoin, au minimum, de
recherches sur des groupes précis et, en mars, il a été annoncé que de telles
expérimentations se dérouleraient en Australie, aux Pays-Bas, en Allemagne et
en Grèce.
Mais beaucoup de scepticisme est déjà témoigné quant à l'efficacité du BCG contre le nouveau coronavirus. Par exemple, si cette théorie était correcte, alors pourquoi en Chine, où la vaccination au BCG est générale, compte-t-on tant de personnes infectées ?
Mais beaucoup de scepticisme est déjà témoigné quant à l'efficacité du BCG contre le nouveau coronavirus. Par exemple, si cette théorie était correcte, alors pourquoi en Chine, où la vaccination au BCG est générale, compte-t-on tant de personnes infectées ?
De plus, la durée de la protection du BCG n'est pas
exactement déterminée.
On pense qu'il est pleinement actif pendant 10-15 ans, après quoi l'effet est atténué, et ce, à condition que la vaccination soit effectuée à un enfant. Sur les adultes, le préparatif peut se montrer bien moins efficace.
On pense qu'il est pleinement actif pendant 10-15 ans, après quoi l'effet est atténué, et ce, à condition que la vaccination soit effectuée à un enfant. Sur les adultes, le préparatif peut se montrer bien moins efficace.
Les auteurs de l'étude sur la relation entre le BCG et
le Covid-19 notent eux-mêmes que « différents pays utilisent différents
calendriers de vaccination au BCG [vaccinés à des âges différents et en
quantités différentes], ainsi que différentes souches de la bactérie ».
Personne n'a jamais cherché à savoir quelle souche pourrait mieux empêcher la propagation de l'infection.
Personne n'a jamais cherché à savoir quelle souche pourrait mieux empêcher la propagation de l'infection.
Et que disent les médecins russes ?
« La vaccination au BCG est un moyen de stimuler
l'immunité. Dans certaines conditions, cela aide vraiment. Là encore, pour
l'évaluer, nous avons besoin d'une recherche clinique de qualité », déclare Nikolaï KOROBOV,
pharmacologue et professeur associé de la Faculté de médecine fondamentale de
l'Université d'État de Moscou.
De manière générale, en Russie, personne ne réfute que
ce vaccin est un activateur de l'immunité, son introduction dans le corps
entrainant une réponse immunitaire vive.
Cependant, son effet possible contre
le Covid-19 n'a pas encore résisté à la critique. « La seule chose qui
unit le coronavirus et la tuberculose est la voie de transmission aérienne.
Tout le reste est le fruit du fantasme de quelqu'un, affirme Alexander PANTELEÏEV,
principal phtisiologue de Saint-Pétersbourg et médecin en chef du dispensaire
de tuberculose de la ville.
Le vaccin BCG est un vaccin de courte durée, il
protège au maximum pendant 10 ans. Pour cela une revaccination était également
effectuée. Dans un organisme adulte, le vaccin BCG ne vit déjà plus par
définition, donc dire qu’une certaine immunité contre le coronavirus est
apparue n’est tout simplement pas sérieux. Ensuite, il s'agit de types
d'infections complètement différents, et le type de mécanisme croisé qui peut
exister ici n'est pas du tout clair ».
Le docteur-vaccinologue
Evgueni TIMAKOV estime également qu'en l'absence de preuves, ces arguments sont
irrecevables : « Si
nous parlons du fait que la vaccination protège le corps contre le Covid-19, il
faut voir quelles vaccinations ont été faites ou pas du tout, quel niveau
d'immunité, et même un tableau allergique de base. Et jusqu'à présent, il y a
plus de questions que de réponses ».
Mais même si l'on imagine que
le BCG sera efficace, il ne faut pas l'espérer dans un avenir proche. « La vaccination doit être faite
avant le début de l'infection. Je ne pense pas qu'elle puisse avoir un
quelconque effet sur la pandémie actuelle. Pour que l'immunité se développe,
cette vaccination doit prendre beaucoup de temps. Il est peu probable qu'elle
soit utile maintenant », juge Vladimir BOLIBOK, un
immunologiste.
02 avril
2020
Ekaterina SINELCHTCHIKOVA
pour RBTH
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