Au
milieu des informations contradictoires que nous livrent de part et d’autre les
médias, il semble utile de rappeler quelques vérités. Donner des explications
ne veut pas dire excuser.
Cela permet juste de comprendre et se faire par
soi-même sa propre opinion.
La
position médiane du Président Macron me semble juste, même si depuis quelques
jours elle semble devenir plus « otaniste ».
Tôt ou tard la Paix
reviendra entre les belligérants, le plus rapidement possible espérons-le, il
faudra bien alors dialoguer avec la Russie qui de toute évidence reste un
partenaire ainsi qu’en témoigne Pierre de Gaulle dans son discours que vous
pouvez lire ci-dessous.
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Discours
de Pierre de Gaulle le 14 juin 2022 à l’Ambassade de Russie en France
à
l’occasion de la Fête nationale de la Fédération de Russie.
Vos
Excellences, Mesdames, Messieurs les Officiels, Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie, au nom de ma famille et de mon père, l’Amiral de Gaulle, de
nous inviter pour la célébration de votre fête Nationale.
Nos
peuples sont liés par de longues années d’amitié et par le sang versé contre
les Nazis. C’est l’occasion pour moi de répéter que la relation franco-russe était
pour le Général de Gaulle d’une importance toute particulière. La France et la
Russie sont proches l’une de l’autre mais aussi unies par la conscience de leur
communauté d’intérêts et de destins.
Plus
encore, la Russie était vue par mon grand-père comme l’allié de revers
indispensable à sa sécurité mais parce qu’elle participait à sa conception de
l’équilibre de l’Europe et de sa place de l’Europe dans le monde. Le Général
disait même : « La décision funeste de Napoléon d’attaquer Alexandre
1er est la plus lourde erreur qu’il ait commise. Rien ne l’y
forçait. C’était contraire à nos intérêts, à nos traditions, à notre génie.
C’est de la guerre entre Napoléon et les russes que date notre
décadence. »
Je
viens ici pour affirmer une nouvelle fois haut et fort, qu’il est de l’intérêt
de la France de garder de bonnes relations avec la Russie et de dire qu’il faut
que nous travaillions ensemble en vue d’aider à l’union et à la sécurité de
notre continent, ainsi qu’à l’équilibre, au progrès et à la paix du monde tout
entier.
Chacun
reconnaît aujourd’hui la responsabilité des États-Unis dans le conflit actuel,
le rôle funeste de l’Otan qui s’élargit sans cesse et la politique inconsidérée
du Gouvernement Ukrainien. Ce dernier, fort de belles promesses et nourri d’illusions
américaines et européennes, a conduit une politique très condamnable à l’égard
des populations russophones du Donbass, multipliant discrimination, spoliation,
embargos et bombardements. Les Occidentaux ont malheureusement laissé faire
Zelenski, ses oligarques et les groupes militaires néo-nazis s’enfermer dans
une spirale de guerre.
Cet
aveuglement est lourd de conséquence pour le peuple ukrainien. Mais ne nous y
trompons pas : que veulent les Américains si ce n’est provoquer une
nouvelle confrontation Est-Ouest, dont le seul but est d’affaiblir et de
diviser l’Europe pour imposer leurs directives, leur économie et leur
système ? Depuis la première guerre mondiale, les Américains ont conclu un
pacte pour établir un équilibre nécessaire des forces en Europe et s’associer à
la sécurité du continent européen. Ce n’est pas en organisant une escalade
militaire systématique en Ukraine, qu’ils respecteront leur engagement, ni
leurs grands principes de liberté et de démocratie !
Les
États-Unis sont dans l’erreur, l’Otan est dans l’erreur, dont l’expansionnisme
débridé et irréfléchi conduit inexorablement au déséquilibre du Monde et à
l’injustice. Les belles promesses des Américains de ne pas élargir l’Otan à
l’Est, ni au Nord, n’ont pas été respectées. Les accords de Minsk n’ont pas été
respectés.
La
réalité, c’est que les Américains n’ont jamais accepté, ni l’Occident avec eux,
qu’après la difficile transition de 1991 et la reconstruction qui a suivi, que
la Russie ne s’intègre pas dans son monde unipolaire. Les Américains ni
l’Europe, n’ont jamais accepté que la Russie se transforme selon le modèle
occidental, à son image.
A
cause de cela et d’emblée, le Président Poutine fût perçu comme un dictateur,
alors que c’est un grand leader pour son pays !
Les
États-Unis n’ont jamais non plus accepté la perte du rôle du dollar comme
monnaie prépondérante dans le règlement des échanges internationaux dans le
monde. Le pire est, que dans cet aveuglement, ils ne font que renforcer, en
déplaçant les intérêts économiques et financiers à l’Est, la position de la
Chine et de la monnaie chinoise qu’ils veulent aussi combattre ! Les
sanctions, qui sont celles de la politique du faible, sont inopérantes, sauf à
affaiblir les Européens et autres nations du monde. Les Africains eux-mêmes,
par l’intermédiaire du Président de l’Union Africaine, Monsieur Macky Sall,
s’en inquiètent considérablement.
En
provoquant une crise économique profonde, systémique et durable qui nous touche
déjà tous, du prix du pain, au chauffage et aux carburants mais aussi par la
pénurie agro-alimentaire, des matières premières et des métaux industriels
qu’elle entraîne, les Américains affaiblissent les Européens à leur profit.
Aura-t-on oublié que depuis au moins un siècle, toutes les crises financières majeures
viennent des États-Unis ? « Notre dollar, votre problème »
disait Henry Kissinger. Les Américains nous tiennent toujours par leur
endettement, qu’ils exportent.
En
imposant aussi un modèle culturel et social qui repose sur le culte de la
jouissance et de la consommation, les Américains sapent le socle de nos valeurs
traditionnelles et les deux piliers de la civilisation que sont la famille et
la tradition.
L’Europe
et bien sûr la France ont tout à perdre à s’enfermer dans cette escalade
militaire et idéologique voulue par les États-Unis et l’Otan. Charles de Gaulle
le disait : « l’Amérique ne fait pas partie de l’Europe. Je crois
l’avoir découvert sur la carte. »
De
la conjoncture actuelle, terrible et redoutable, La France peut et doit jouer
un rôle capital. La France et la Russie sont toutes deux filles de l’Europe. La
France ne doit pas oublier qu’elle est l’ainée des nations européennes et
qu’aucune n’a derrière elle une aussi longue trainée de gloire. Mon grand-père
a toujours soutenu et défendu l’impérative nécessité, même aux moments les plus
difficiles de l’histoire, de construire et préserver une relation forte et
partagée avec la Russie.
Il
aimait la Russie. Nous aimons, ma famille et moi, la Russie et son peuple. Le
peuple russe, dont le droit de propriété est si injustement bafoué partout dans
le monde. Cela me rappelle les pires moments de l’occupation et du régime de
Vichy en France. Et les artistes, les sportifs russes, sont-ils aussi
responsables ?
Cette
politique systématique et aveugle de confiscation et de discrimination du
peuple russe tout entier est scandaleuse et me choque considérablement.
Permettez-moi
de citer encore une fois le Général de Gaulle : « En France, on n’a
jamais considéré la Russie comme un ennemi. Je suis pour le développement de
l’amitié franco-russe et je n’ai jamais envoyé et je n’enverrai jamais des
armes aux gens qui se seraient battus contre la Russie soviétique. »
Les
Américains donnent de l’argent (et des armes), nous les payons en parts
d’indépendance. Je regrette que le Gouvernement français se commette dans cette
soumission à l’Otan et donc à la politique américaine.
Je
déplore, que de par la volonté de certains présidents français, la France se
soit dissoute dans l’Otan. Or, le Général de Gaulle s’est toujours efforcé de
maintenir l’indépendance de la France dans le commandement intégré de l’Otan.
L’Otan
absorbe l’Europe. Depuis, les Américains ne parlent plus à la France et ne nous
considèrent plus comme une nation forte et indépendante.
Faut-il
rappeler le camouflet récent subi par la France dans la rupture brutale et
unilatérale du contrat d’achat des sous-marins australiens par l’Australie,
Membre du Commonwealth et qui fût orchestré par les anglais et les
américains ? La France peut-elle se contenter, outre sa perte de
souveraineté, des trois jours d’avance en munitions et en carburant que lui
octroie l’Otan ? Je ne comprends pas la politique du Président français.
Fort
de ses convictions, de son armée et de la force de dissuasion qu’il a lui-même
construite au grand dam des Américains, le Général de Gaulle a eu la
détermination de sortir de l’Otan, tout en restant comme membre de droit de
l’Alliance Atlantique. Je souhaiterais que le Président français ait ce courage
et cette volonté, plutôt que de subir les affres de la pensée unique et de la
politique commune imposée par les Américains, qui le rendent dépendant.
De
la même manière, je ne me reconnais pas dans la France d’aujourd’hui, dans
cette politique du « en même temps », qui nous affaiblit. Je ne me
reconnais pas dans l’abandon actuel des valeurs, de notre histoire, de notre
culture, de nos grands principes de liberté, du devoir et de la sécurité.
Le
Général de Gaulle écrivait. « Il existe un pacte vingt fois séculaire
entre la grandeur de la France et la liberté du monde. » Notre but est et
doit rester d’établir une entente européenne entre l’Atlantique et l’Oural. Au
milieu des alarmes du monde et des dangers de la crise actuelle, la France peut
et doit, à nouveau, peser de tout son poids et chercher un arrangement avec les
pays belligérants et la Russie en particulier.
On
ne fait pas la guerre tout seul !
C’est
une conviction que les idéologies, donc les régimes qui les expriment, en
Ukraine comme ailleurs, ne sont que de passage. « Seuls comptent, appuyés
sur les fondements politiques, la patine des siècles et la capacité des pays à
rester grands ».
Comme
le disait le Général de Gaulle en 1966 lors de son deuxième voyage en
Russie : « La visite que j’achève de faire à votre pays, c’est une
visite de la France de toujours à la Russie de toujours. »
Je
vous remercie.
Pierre
de Gaulle